L’île de Cham : une parenthèse chez Mamma kim

Il faut savoir écouter les voyageurs que l’on croise.

C’est au Cambodge, à Kompong Chnang, que trois voyageuses m’ont racontées leur séjour chez Mamma Kim, une habitante de l’Ile de Cham au large de Hoi An au Vietnam.

Cette dame, d’une soixantaine d’années, habite dans un village de pêcheurs. Ses enfants, partis vivre à Hoi An et à Da Nang ont laissé libres des chambres qu’elle met à disposition des voyageurs contre le sous.

Même si chaque jour, l’île est ralliée par des dizaines de speed boats, son petit hameau de trois ruelles semble épargné par la mondialisation.

Ici rien de bien exceptionnel à voir. Le village est rustique mais pas modelé pour le plaisir du voyageur.  Nous arrivons d’ailleurs dans le même bateau que leurs vivres et disons ce qui est, une fois que tout le village sait chez qui l’on dort, les gens se foutent royalement de nous et retournent vaquer à leurs occupations.

Toutefois, en demandant aux bonnes personnes (et Mamma Kim semble être l’une des stars du village) et monnayant quelques billets pour l’essence et les appâts, il est assez facile de trouver une bonne âme pour nous amener jeter les palangrotes en mer.

Cet été je n’irais pas pêcher dans mes calanques chéries, que cela ne tienne, je pêcherai demain à l’autre bout du monde !

J’ai décidé de partir samedi matin afin d’éviter un week-end à Hoi An. Quand on voyage il n’y a plus vraiment de week-end et même si cela a beaucoup de bons côtés, mon réveil n’a quand même pas hésité à sonner  à 5h30 ce jour là. Il n’y a qu’un bateau qui part sur l’île (sans compter les speed boats hors de prix) et il quitte le port de pêche à 7h. Je pars donc de mon auberge une heure avant, laissant mon gros sac à dos qui attendra mon retour sur le continent, et vais boire un café à la capitainerie.

Je suis le seul étranger assis là et quand je commande mon café, deux personnes interpellent le serveur en vietnamien. Je comprends qu’ils ont commandé pour moi et reçois quelques minutes plus tard un café glacé avec du lait.

Il ne me restait plus qu’à trouver mon embarcation, ce qui s’avéra plus compliqué que prévu, le bateau étant accosté à plusieurs centaines de mètres de la. Je compris en me présentant que le modeste équipage était surpris de me voir.

  • je veux aller sur L’île de Cham ! Demandais-je tout sourire.
  • Pourquoi faire ? L’homme qui me répond regarde ses collègues qui ne semblent pas très à l’aise à l’idée de me prendre ici. S’ils se sont fait chier à mettre en place un business à quelques kilomètres de la avec des speed boats qui rallient l’île en 30 minutes, pourquoi certains voyageurs continuent à venir les ennuyer pour faire la traversée en 3 heures avec eux !

Trop tard j’ai tendu mon sac au gars qui, surpris, se décale pour me laisser passer. Je paie et vais m’installer sur le ponton supérieur du bateau.

Quatre autres touristes arrivent, eux tentent de négocier mais le ton monte vite. Ils finissent tout de même par monter.

Le bateau quitte le quai et nous voilà partis avec ! Nous descendons la rivière, nous faisant accoster par des barques qui nous donnent des canards et d’autres denrées destinées à être vendues sur l’île.

Juste avant de prendre la mer, nous nous mettons à quai et c’est la que je comprends la réticence du capitaine à nous laisser monter.

Deux contrôleurs viennent et nous demandent de payer une nouvelle fois. Nous sommes surpris et leur expliquons que nous avons déjà payé et qu’il était hors de question de payer à nouveau. Les contrôleurs ne parlent pas très bien anglais et ce n’est qu’au bout de quelques minutes que nous comprenons que, devant notre arrivée impromptue, le capitaine avait essayé de se faire un peu d’argent facile, nous transportant comme des clandestins dans son bateau qui s’était transformé au fil du voyage en arche de Noé (je pars du principe que les asiatiques mettraient sans hésitation des scooters dans leur arche à eux !), et le capitaine s’était bien gardé de dire aux contrôleurs qu’il nous avait déjà fait payer.

Les contrôleurs ont tout de même fini par comprendre et je ne sais pas s’ils sont allés réclamer leur dû au capitaine ou pas mais pour nous l’honneur était sauf. Nous n’avons pas payé une seconde fois !

Quoi qu’il en soit, nous arrivons sur l’île de Cham quelques heures plus tard et un second bateau nous récupère. Mamma Kim doit avoir une sacrée réputation car je suis le seul des 7 passagers à ne pas payer de charge… enfin je mens, les canards qui nous suivent depuis un moment maintenant ont été exemptés de frais aussi… mais j’espère que nos destins vont finir par être dissociés !

Mamma Kim m’attend sur le ponton. Elle me prend par le bras et m’emmène jusqu’à chez elle. Elle est accompagnée d’une jeune femme qui vit au temple. Toutes deux ne parlent que vietnamien mais la jeune fille ne semble pas comprendre que je ne pipe pas un mot de ce qu’elle me dit. Elle rit sans arrêt sans que je ne comprenne pourquoi.

 

Un pécheur ne s’encombrant pas de moulinet trop technique ! Un bout de canne, un anneau et un morceau de gouttière font amplement l’affaire !

Une fois installé, Mamma Kim s’attelle à la préparation de ce qui s’avérera être un véritable festin tandis que la jeune fille me propose de me faire visiter le village et le temple. Je commence à comprendre qu’elle a des intentions quand elle m’offre un bracelet et une fleur. Elle me prend par le bras et interpelle tous les villageois lorsque l’on passe devant eux. Elle semble se moquer que je ne comprennes absolument rien à ce qu’elle me raconte même si je pense qu’elle me propose de l’accompagner au karaoke le soir.

Après le déjeuner (et une petite sieste), je me décide à aller découvrir l’île. En réalité je me rends vite compte que le tour de l’île va être vite fait. Je suis à une extrémité et la route allant vers la foret est condamnée par l’armée. Il ne me reste plus qu’à prendre la route menant à l’autre village de l’île.

Cette route longe la côte et, même si chaque sortie de virage me fait découvrir un nouveau paysage de carte postale, le trajet s’avère finalement assez frustrant. En effet, l’île étant relativement déserte, de nombreuses plages ne sont accessibles qu’en bateau. C’est ainsi qu’il m’aura fallu marcher près de cinq kilomètres avant de trouver un bout de paradis au sable blanc. Je m’y installe jusqu’à ce que la tombée du jour me rappelle au bon souvenir qu’il me faille désormais faire la route en sens inverse.

Le soir, je passe un peu de temps avec Mamma Kim,et la jeune fille qui, malgré le fait que je n’ai pas donné suite à ses avances, a tout de même trouvé judicieux de venir me regarder manger. J’eu alors  l’idée de sortir mon téléphone et d’utiliser mon traducteur échanger  quelques banalités.

Mamma Kim sort un album de famille et me parle de ses enfants tandis qu’au bout de quelques minutes la conversation s’axe autour de mon nez. Mamma Kim le compare au sien et me dit que les vietnamiens n’en ont pas ! Même si parfois j’ai l’impression d’avoir le profil d’un des pieds nickelés, j’ai l’impression que Cirano est un petit enfant quand je compare mon nez au sien ! On rit.

À 19h45, mon hôte finit par tomber de fatigue. Quand on vit au rythme du soleil, se coucher à presque 20h ressemble fortement à une veillée. Elle prend un bâton et le tend vers son horloge. Elle pointe 6h et je comprends qu’elle me conseille d’aller au lit aussi. En effet, demain matin je pars rejoindre un pêcheur pour partir à la pêche.

N’ayant pas le défaut d’être en retard, je suis prêt quand Mamma Kim vient me réveiller à 5h40. Elle me prend le bras et nous partons vers la plage. Là, un petit monsieur me fait des grands signes. Il saute de son bateau et vient me saluer. Arrive ensuite le couple d’allemand qui complétera l’équipage et après nous être tous présentés, nous embarquons.

Les palangrotes sont rudimentaires mais finalement en France ou à l’autre bout du monde, la pêche reste la pêche. Je suis donc de suite opérationnel et lance ma ligne à l’eau.

Pas le temps de dire ouf que le pêcheur attrape un premier poissons d’une petite trentaine de centimètres. Je me frotte les mains sans pour autant avoir encore eu la moindre touche. D’ailleurs elle se fait attendre quelques minutes et l’allemande a eu le temps de sortir un premier poisson avant que cela ne veuille bien mordre au bout de mon fil.

La première touche ne s’avéra pas être un succès. Mon père se serait sans doute moqué de moi quand en toute modestie, j’accompagnais mon mouvement pour remonter le poisson d’un « SHARK » qui fit l’effet d’un pétard mouillé une fois les hameçons hors de l’eau. Le poisson n’avait en effet même pas eu le temps de décrocher mon appât.

Ni une, ni deux je laisse couler le plomb à nouveau et cette fois ci j’attends suffisamment avant de ferrer. Le poisson était bien au bout, mon blason quelque peu redoré.

Nous restons jusqu’à 8h en mer et malgré mon application je n’ai remonté seulement quatre poissions qui ne permettraient certainement pas de faire construire une statue en mon nom au centre du port…

Pendant ce temps là, notre ami pêcheur remontait régulièrement de quoi remplir sa besace (mais je suis sur qu’il trichait !).

Nous rentrons et il me donne mes poissons en disant à Mamma Kim de me les cuisiner pour midi.

La suite de mon séjour s’avéra moins enthousiasmante. Cela faisait quelque jours que je commençait à avoir mal au ventre et je ne sais pas pourquoi c’est aujourd’hui que mes batteries ont décidé de lâcher. J’ai donc passé l’après midi au lit. Ne me levant que pour aller voir le couché de soleil sur le port.

Mamma Kim a malgré tout été aux petits soins pour moi. Me demandant régulièrement si j’avais besoin de quelque chose et me proposant de me badigeonner le ventre avec une huile chinoise, sorte de remède à tout faire (qui a plutôt bien marché).

Elle s’occupa de réserver mon bateau pour le lendemain avant de m’offrir un bol de riz.

Je pris la route le lundi à 7h du matin. Il me fallait marcher un peu plus de 6 kilomètres avant d’arriver au village principal de l’île. Lors de notre au revoir’ Mamma me prit dans ses bras et m’offrit un bracelet, sorte de chapelet que les bouddhistes utilisent pour faire leur prière. Je comprends à ses gestes qu’elle priera pour moi et je la remercie grandement pour cette attention.

Je ne croise pas grand monde sur la route. 6 kilomètre c’est court et long à la fois. La route est à flanc de montagne et certaines montées me rappellent que je n’ai mangé qu’un bol de riz en presque deux jours.

Heureusement, arrive dans le second village je croise le cousin de Mamma Kim. Il m’avait mené sur son bateau jusqu’au village de pêcheurs deux jours auparavant.

Je lui demande quand part le prochain ferry et il m’explique tout. Il m’accompagne attendre un peu au café et explique (je crois) à tous ceux qui voulaient bien l’entendre que je venais de passer deux jours sur l’île.

Une vieille dame qui avait entendu parler de moi s’arrêta et lui parla. Elle venait aux nouvelles pour savoir si mon mal au ventre était passé. La patronne du café entendant cela m’offrit un petit déjeuner complet avec galette de riz, mangue, banane et café. Les nouvelles vont vites sur une si petite île, mais aujourd’hui, je ne risque pas de m’en plaindre !

Je voulais absolument aller à la rencontre d’un village de pêcheur pendant mon voyage. Je suis donc vraiment content d’avoir pu le faire ici au Vietnam.

Si vous devenez venir, restez deux nuits ici. Prenez le temps d’aller vers les gens. Je me souviendrai longtemps de ce jeu de cartes vietnamien qui, malgré les explications des femmes qui y jouaient, restera un mystère de plus pour moi !

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