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L histoire de Captain Hook et de son village

Nous avons rencontré « Captain Hook »  le deuxième jour de notre périple sur le plateau des Bolovens.
Il vit dans son village (dont j’ai oublié le nom…), et propose des visites guidées pendant lesquelles il nous parle de sa plantation de café (mais j’ai déjà écrit un article sur le café de Mister Vieng), des plantes médicinales qu’ils utilisent, et de l’animiste, particularité de son village, avec son lot de gourou, de chaman et de magie…
Captain Hook est froid et mystérieux et parle un anglais parfait à la différence des autres villageois qui ne parlent même pas Lao. Son histoire est aussi intéressante que bouleversante et ne laissera personne indifférent.

Un village ani… quoi ?!?

Tout le village est animiste, c’est à dire que ses habitants croient en une force vitale qui habite chaque être vivant, chaque objet ainsi que les éléments naturels (tels que l’eau, l’air…).

Ces âmes ou ces esprits mystiques, manifestations de défunts ou de divinités animales, peuvent agir sur le monde, de manière bénéfique… ou non. Il convient donc de leur vouer un culte. Ainsi défini, comme « croyance à l’âme et à une vie future et, corrélativement, croyance à des divinités directrices et des esprits subordonnés ».

Captain Hook nous explique que dans son village, chaque décision doit être prise en présence du gourou ou du chaman qui invoquent les esprits les soirs de pleine lune pour en tirer une réponse.

Ils ont même une forêt où vivent les esprits, et dans laquelle personne n’a le droit de pénétrer.

En savoir plus sur l’animisme : https://www.scienceshumaines.com/l-animisme-est-il-une-religion-entretien-avec-philippe-descola_fr_15096.html

70 à la maison : La polygamie  

Dans le village de Captain Hook, les hommes peuvent avoir autant de femmes qu’ils le souhaitent. La première est choisie par leurs parents, Ils peuvent choisir les suivantes.

Plus un homme a de femmes, moins il a besoin de travailler en revanche, il doit se coltiner toutes SES belles familles dans sa maison ce qui fait passer la série « Sept à la maison » pour une famille de rigolos !

La plus grande famille du village compte 80 membres, qui vivent dans une maison qui, malgré les ajouts de pièces, n’est finalement pas si grande que ça !

Les femmes, que dis-je, les petites filles, peuvent se marier dès l’âge de 8 ans. Un homme du village, qui a 20 ans, est d’ailleurs marié avec une petite de 8 ans…

Malgré tout, il reste un peu de séduction dans ce monde qui semble si loin du notre. Captain Hook nous emmène dans la forêt et coupe une feuille d’un arbre qu’ils appellent « le romantique ». Il la positionne entre ses mains et en soufflant dedans crée un son qui est en réalité une alerte destinée à la fille que l’homme veut séduire. Il nous explique qu’ainsi, depuis la forêt, le jeune homme peut prévenir sa dulcinée sans que son père sache qui est l’homme derrière cet appel. Malynx le lynx !

Avoir un bébé dans le village

Lorsqu’une femme enceinte arrive au terme de sa grossesse, elle doit se rendre dans le cimetière dans la forêt pour y accoucher. Ainsi, si les morts doivent être enterrés à l’extérieur du village pour ne pas que leurs esprits hantent les maisons, il faut croire que la femme enceinte n’est pas considérée comme des masses plus bienveillante que ces derniers !

Quelques jours après l’accouchement elle est en droit de revenir au village. Là encore, le rituel lui demande de traverser une sorte de mur de feu pour se purifier  et elle doit rencontrer le gourou qui organise une cérémonie lors de laquelle il demande à la mère si elle estime que son bébé est bon ou mauvais. Si selon elle c’est un « mauvais bébé », alors celui-ci sera abandonné en dehors du village.

Après ça, lors de chaque pleine lune, les parents du bébé devront raconter leurs rêves au gourou. Tant qu’il estimera que le rêve de la nuit n’est pas bon, le bébé n’aura pas de nom. Ce qui fait qu’un enfant peut passer plusieurs années sans avoir de prénom…

Le jour où le rêve raconté plaira au gourou, il le retranscrira sous forme d’un prénom qui sera alors celui de l’enfant.

La médecine traditionnelle

Ici, personne ne va chez le médecin. La médecine est uniquement pratiquée avec les plantes ou les insectes trouvés aux alentours du village. Vers, vomissements, brûlures, diarrhée… à chaque maux sa solution. Les fourmis rouges servent même de déodorant !

Captain Hook nous montre quelques plantes et nous explique leurs propriétés. Bien évidemment je n’ai rien retenu !

Par ici, une tige qui produit une sève avec laquelle on peut faire des bulles de savon et accessoirement apaiser les brulures, là, une plante « sensitive » qui, lorsque qu’on la touche se rétracte et qui a pour bienfait de soigner les maux de ventre lorsqu’elle est bue en infusion ou encore une feuille avec laquelle on produit des fibres incassables pour coudre les vêtements !

La magie blanche et noire

Le gourou et le chaman du village (chacun a un rôle bien précis) pratiquent deux sortes de magie : la blanche, pour attirer le bien ; et la noire, pour jeter le mal sur quelqu’un. Mr Hook ayant d’après ce que j’ai compris, fait l’objet d’un sort de magie noire, il n’a pas trop trop trainé sur la question. Par contre, ce que nous apprendrons en nous promenant dans le village en sa compagnie est que le chien est ici un véritable bouc émissaire : lors de cérémonies, on attache un chien sur la place centrale du village, là où sont organisées toutes les cérémonies, et chaque membre du village a son tour frappe le chien avec le pied pour se décharger de leurs mauvais esprits et les transmettre à l’animal.
Et ce jusqu’à la mort de la petite bête qui est alors jetée en dehors du village.

L’histoire de Captain Hook 

Je ne vous en ai pas parlé car juke n’en ai pas vu mais les enfants commencent à fumer dès l’âge de 5ans… ce qui donnent quelques regards vitreux…
Crédit photo : https://trotteursobouduglobe.com/2017/07/24/en-route-pour-laventure-sur-le-plateau-des-bolovens/

Dans son village, la majorité des habitants ne savent ni lire ni écrire, ni même parler Lao. Ils communiquent avec le dialecte propre à leur village.

Captain Hook, de son vrai nom Mr Hook (ça reste classe), lui, parle un très bon anglais, avec un vocabulaire très riche.

Il nous explique qu’à huit ans environ (il est difficile pour lui de dater les événements de sa vie car il ne connait pas sa date de naissance et donc son âge, à trois ans près), ses parents lui ont choisi, comme c’est la coutume, une femme pour se marier, mais il a refusé, préférant aller à l’école.

À 13 ans, rebelote, nouvelle femme, nouveau refus, et Mr Hook part étudier dans le village de sa maîtresse d’école puis à Bangkok jusqu’à l’âge de 21 ans où il retourne dans son village natal.

Ses parents lui soumettent alors un ultimatum : soit il doit se marier avec la femme qu’ils auront une troisième fois choisie soit il sera banni du village (simple et efficace).

Mr Hook a cédé.

Pour être tout a fait juste, sachant que s’il décidait de refuser, sa famille aurait été bannie avec lui après avoir reçu un sort de malheur sur eux et les générations futures, Captain Hook a capitulé sous la pression du village et de ses parents, fervents animistes, qui auraient été anéantis par une telle décision.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là ! Car si les règles du village sont très strictes, il y en a une (autre) dont Captain Hook a fait les frais : la virginité des deux mariés avant la première union. Même si l’on dit que ce qui se passe à Bangkok reste à Bangkok, on ne ment pas si facilement aux esprits et au gourou ! Hook eu beau nier,  il fut convoqué avec son père par le gourou.

Ce dernier prépara une mixture mélangeant  du sang de poulet fraîchement égorgé avec de l’eau sale, et ordonna au jeune homme de boire cette potion. S’il était coupable, il mourrait dans trois jours, sinon, tout irait « bien ».

Prenant peur, le père de Hook a décidé de payer la survie de son fils en offrant aux membres du villages plusieurs cochons, poulets et autres animaux.

Malgré ça et depuis le décès de son papa (dont il a été tenu pour responsable, à cause des mauvais esprits pesant sur lui…), Mr Hook n’a plus le droit d’aller visiter les maisons des autres membres du villages, ni d’en sortir seul…

Désormais, il habite dans sa maison avec sa femme  (il n’est pas polygame) et son enfant, qu’il a appelé Pan (comme Peter Pan) sans passer par le gourou !

Pour finir sur une note plus gaie

Les habitants du village ne voient des étrangers que depuis quelques temps. L’homme blanc aux yeux clair et cheveux jaunes est donc une cureosité pour eux. Ils pensent ainsi que nous sommes blancs parce que l’on ne travaille pas (logique, tous les blancs venant dans leur village sont en vacances !), que les yeux bleus sont la conséquence de trop de sodas et que les cheveux jaunes sont également une malformation dont j’ai oublié la cause mais je suis sur que c’est logique… pour eux !

Le village de Captain Hook étant animiste, il est impossible de prendre les gens en photo. En effet, une personne photographiée pense que son âme est emprisonnée dans la photo. Je ne voulais pas être responsable d’un tel malheur pour ses gens ! Malgré tout Captain Hook ne voyait aucun inconvénient à se laisser photographier. Je n’ai compris ça que trop tard ce qui fiât que  les illustrations ne sont pas de moi ! 😉 

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